Trois semaines de confinement : la situation sanitaire et sociale des personnes sans-abris reste catastrophique à Grenoble et en Isère. Des collectifs et associations passent depuis plusieurs années dans les centres d’hébergement hivernaux et constatent chaque année une dégradation des conditions d’hébergement dont la précarité reste la règle. Dans le contexte de crise sanitaire, cette situation est d’autant plus inquiétante. Si quelques maigres améliorations ont pu être obtenues dans les centres d’hébergement d’urgence depuis le début du confinement, suite à la mobilisation des personnes concernées, des collectifs et des associations de soutien ; les conditions d’hébergement restent indignes et dangereuses, tandis que des milliers de personnes demeurent à la rue en Isère.
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Communiqué Lutte Hébergement Grenoble
Mardi 7 avril 2020 : jour n°23 du confinement dans les centres d’hébergement d’urgence
Trois semaines de confinement : la situation sanitaire et sociale des personnes sans-abris reste catastrophique à Grenoble et en Isère. Des collectifs et associations passent depuis plusieurs années dans les centres d’hébergement hivernaux et constatent chaque année une dégradation des conditions d’hébergement dont la précarité reste la règle. Dans le contexte de crise sanitaire, cette situation est d’autant plus inquiétante.Si quelques maigres améliorations ont pu être obtenues dans les centres d’hébergement d’urgence depuis le début du confinement, suite à la mobilisation des personnes concernées,des collectifs et desassociations de soutien ; les conditions d’hébergement restent indignes et dangereuses, tandis que des milliers de personnes demeurent à la rue en Isère.
Depuis deux semaines, trop peu de changements :
Les distributions alimentaires sont encore insuffisantes en quantité, ou bien non adaptées aux régimes spécifiques (allergies, diabète, cancers,etc). En raison du confinement, les aides alimentaires habituelles sont remplacées par des livraisons de barquettes uniquement, ne pouvant répondre aux besoins des personnes. En même temps, dans certains centres d’hébergement, l’accès à une cuisine est restreint ou bien inexistant. Par exemple à Voreppe, pour 45 familles, il n’y a qu’un seul frigo et 4 plaques chauffantes, accessibles seulement deux fois par semaine (hébergement géré par l’Ajhiralp – ex AREPI). Il est inadmissible que des personnes n’aientpas la possibilité de manger à leur faimet selon leurs besoins.
La situation sanitaire demeure quasiment inchangée. Les douches, les toilettes, les machines à laver sont en nombre insuffisant, voire complètement absents (alors que la plupart des lieux publics donnant accès à l’hygiène ont fermé depuis le confinement). Les sanitaires sont généralement dans un état indécent. Certains lieux n’ont toujours pas reçu de produits d’hygiène de base, tel que du savon, ou du produit vaisselle, notamment au Brit hôtel à Grenoble (hébergement géré l’Entraide-Pierre Valdo). Nous dénonçons ces conditionsd’hygiènedangereuses, tout particulièrement en période de crise sanitaire.
En ce qui concerne la « continuité pédagogique », les enfants des centres d’hébergement sont laissé-e-s pour compte, sans ordinateur, ni internet, ni imprimante. Aucun cahier, stylo ou matériel scolaire ne leur a été distribué par les associations gestionnaires. Cela met en lumière une inégalité criante dans l’accès à l’éducation, aggravée par les conditions de confinement.
La possibilité de s’informer devient une nécessité quand le gouvernement annonce chaque semaine de nouvelles mesures impactant le quotidien de chacun.e. Or les personnes hébergées ont un accès très limité à l’information. La situation de confinement rend impossible la communication avec l’extérieur. Lorsqu’en plus on ne dispose pas d’un accès à internet, source d’information, de distraction et de communication avec ses proches, cela devient vite invivable. L’isolement se fait de plus en plus profond au sein des structures d’hébergement.
Nous avons appris avec effroi cette semaine que l’approvisionnement en lait en poudre pour les nourrissons est stoppé depuis plusieurs semaines (entre autre au centre d’hébergement de Voreppe où les hébergé-e-s étaient en quarantaine et ne pouvait donc pas sortir se fournir à l’extérieur). Ce qui signifie que plusieurs dizaines de bébés n’ont pas pu manger à leur faim et ce, depuis le début du confinement ! De plus, l’approvisionnement en couches est insuffisant voir inexistant.Il est inconcevableque des nourrissonsn’ait pas accès à l’alimentation nécessaire à leur survie : cette situation dramatiquedoit cesser immédiatement.
Face à cela, quelle est la réponse del’État ?La préfecture annonce l’ouverture cette semaine d’un centre pour les personnes sans-abris souffrant du covid-19, dans un lieu qui était, avant le confinement, un centre d’hébergement hivernal. Les familles hébergées là-bas, ont donc été déplacées dans des chambres d’hôtel où les conditions de vie sont difficiles et inadaptées au contexte de confinement. Et ceci, au lieu de réquisitionner un des nombreux bâtiments vides présents sur l’agglomération grenobloise, comme la préfecture en a la possibilité. Elle préfère attendre que les personnes soient malades pour les parquer dans des centres de quarantaine, au lieu d’améliorer les conditions d’hébergements et de loger les personnes à la rue.Les conditions d’hébergement dans les centres et hôtels rendent tout simplement impossibles le respect des mesures recommandées pour prévenir la propagation du virus.Cela entraîne un affaiblissement de la capacité à faire face efficacement à la pandémie d’une part etrévèleun sacrifice des plus précaires d’autre part.
De son côté, le CCAS (centre communal d’action sociale) de Grenoble organise de rares distributions de nourriture : seulement deux fois par semaine. Pour une ville de cette envergure, et se revendiquant « solidaire », c’est tout simplement honteux. A chaque distribution, ce sont des centaines de personnes qui attendent, plusieurs heures, encadrées par la police municipale, pour un colis de quantité aléatoire. Les personnes qui y viennent doivent parfois traverser toute la ville pour s’y rendre. Ces distributions sont insuffisantes, elles doivent être renforcées et réparties sur l’ensemble de la ville.
Des solutions existent pour mettre à l’abri toutes les personnes à la rue. La métropole,etles communesont des leviers qui permettrait de réquisitionner où mettre à disposition les milliers de logements vides qui existent sur le territoire. Les logements vides des bailleurs sociaux,par exemple, comme ceux présidés par la ville de Grenoble ( ACTIS et Grenoble Habitat), ceux de l’EPFL (dont la présidente, Christine Garnier, est élue de la ville de Grenoble). Refuser d’agir alors que de nombreuses personnes continuent de vivre à la rue en période de crise sanitaire estscandaleux.La ville de Grenoble qui travaille son image de ville solidaire doit prendre ses responsabilités.
Le gouvernement nous parle de guerre et d’unité nationale, mais nous ne sommes pas dupes et nous savons que l’unité nationale est au service du capitalisme et que la guerre se fait contre les pauvres.
Nous n’oublions pas que nous ne sommes pas égaux face au confinement.
Nous faisons appel à la solidarité de tou.te.s pour faire connaître ces situations invisibilisées et soutenir les personnes hébergées. Un appel à dons a déjà été lancé par l’association RUSF 38, que vous pouvez retrouverici.
Contact : lutte-hebergement-grenoble@riseup.net Tél : 07 53 91 18 74
Premiers signataires : Lutte Hébergement Grenoble, DAL 38, RUSF 38, CISEM, collectif des soudanais de grenoble, Ecole ici et maintenant, l’ouvre porte, CNT 38, solidaire 38, AG du travail social 38