Organisation patronale
Le Medef (Mouvement des entreprises de France) est une organisation patronale dont l’objet est de représenter le patronat dans les négociations sociales menées sous l’égide de l’État (les fameuses « négociations entre partenaires sociaux »). Le patronat est ainsi représenté aux côtés des syndicats, qui eux représentent les intérêts des salariés. Le Medef promeut également les intérêts du patronat dans la sphère publique (médias, relations avec les institutions…).
Le Medef incarne avant tout les intérêts des grands patrons du CAC 40 mais curieusement, un grand nombre de dirigeants de PME croient partager ces intérêts, alors qu’un froncement de sourcils d’actionnaire d’une de ces sociétés du CAC 40 peut, par ricochet, leur faire fermer leur entreprise. Nombre de petites entreprises sont en effet sous-traitantes de grandes multinationales et se trouvent donc prises dans une relation de subordination vis-à-vis de ces grandes sociétés : un exemple très local, relaté dans le numéro 80 du journal Fakir (avril-juin 2017), celui de la SCOP Berriat Bâtiment. Il s'agissait d'une menuiserie très ancienne, qui faisait travailler jusqu’à 70 personnes, qui a construit des hôpitaux de Nice à Strasbourg et qui a été coulée par Vinci à l'occasion de la construction de l’écoquartier La Caserne de Bonne à Grenoble, confiée par la municipalité à Vinci. Aux sous-traitants, le « document de consultation soumis par Vinci s’est révélé complètement différent du contrat final qu’on a signé : les alinéas juridiques, les plannings, les pénalités prévues, etc., étaient modifiés ».Vinci a, sur la base de ce document modifié, refusé de reverser à Berriat les 1,5 million d’euros originellement prévus. L'entrepreneur s'est battu pendant quatre ans pour essayer d'éponger l'ardoise et de sauver sa menuiserie, y laissant sa santé. L’entreprise a finalement été liquidée, comme 17 des 22 boîtes qui travaillaient sur cet écoquartier. Ce n'est qu'un exemple parmi des milliers d'autres que les intérêts des grandes multinationales ne sont pas les mêmes que ceux des PME qui ne sont pas cotées en bourse.
Tout dirigeant d’entreprise peut cependant adhérer au Medef, où il[1] trouvera différents services : accompagnement, services juridiques etc.
Le rôle du Medef est avant tout de convaincre tout le monde que ce qui est bon pour les grands chefs d’entreprise est bon pour toutes les entreprises (ce qui faux comme nous l'avons vu) et bon pour tous les habitants du pays (une relation de cause à conséquence que nous serions bien en peine de vous expliquer). Il fait donc tout pour décourager les initiatives qui obligeraient les multinationales à rendre des comptes ou qui limiteraient le pouvoir ou le salaire du dirigeant ou de l’actionnaire majoritaire (se sont souvent plus ou moins les mêmes personnes), et il milite ardemment pour une diminution des droits des salariés, en particulier des cotisations sociales (qu’ils dénomment « charges », mais qui sont en réalité une partie du salaire, mise en commun pour assurer une protection sociale, des droits au chômage, à la retraite, à la formation, etc.). Le Medef considère les salariés comme des coûts et non comme des producteurs de valeur, alors qu'il présente le chef d’entreprise comme un aventurier, voire un héros, audacieux, qui prend des risques, omettant soigneusement de rappeler que les grands chefs d’entreprise sont généralement des héritiers qui savaient dès leur plus jeune âge qu'ils reprendraient l'entreprise de leur papa, et qui mettent en œuvre toutes sortes de stratégies pour se prémunir de tout aléa.
Le Medef entend convaincre chacun d’entre nous d’être le plus conforme possible aux attentes d’un employeur, ou de devenir employeur nous-mêmes.
Notons que depuis une trentaine d’années, les préconisations du Medef sont très souvent mises en œuvre (allongement de la durée des cotisations, autrement dit, recul de l’âge de la retraite[2], abaissement des cotisations sociales patronales[3]) par les gouvernements successifs de notre pays, avec de piètres résultats (chômage croissant, privatisations n’amenant ni économies ni meilleures performances, services administratifs et publics dégradés etc.). Nous vous recommandons très chaudement à cet égard cet article du journaliste Christian de Brie, paru dans Le Monde diplomatique de février 2018.
Il est enfin à signaler que le grand patronat n’a aucun intérêt à voir le chômage diminuer, puisque la peur de se retrouver sur le carreau fait accepter des conditions de travail et de salaire toujours plus médiocres aux employés. Le Medef est donc un promoteur influent du système capitaliste le plus dérégulé.
Le Medef est dirigé au niveau national par Geoffroy Roux de Bézieux, patron connu pour son franc-parler de Notus-Technologies, une entreprise agroalimentaire, qui a succédé à l'Isérois Pierre Gattaz en 2018, le dirigeant de l'entreprise Radiall[4] (Yvon Gattaz, père de Pierre Gattaz, a d'ailleurs aussi dirigé le Medef, qui s’appelait alors CNPF de 1981 à 1986).
En Isère le Medef a à sa tête M. Pierre Streiff, dirigeant d'une grosse entreprise de pomberie/climatisation, et président de la Fédération du BTP de l'Isère. Le Medef de l'Isère emploie une petite dizaine de salariés.
Pour en savoir (beaucoup) plus, nous vous recommandons vivement l’ouvrage Histoire secrète du patronat de 1945 à nos jours, paru aux éditions La Découverte en 2009.
[1] Nous avons privilégié le masculin parce qu’en France, seul un tiers des entreprises de 1 à 5 salariés sont dirigées par des femmes, et seulement 11 % de celles qui comptent entre 100 et 250 personnes.
[2] http://drees.social-sante.gouv.fr/IMG/pdf/er915_toile.pdf
[3] http://www.lemonde.fr/politique/article/2012/11/08/depuis-vingt-ans-la-france-diminue-les-charges-des-entreprises_1786486_823448.html
[4] Pour en savoir plus sur Radiall et sa tendance prononcée pour l’évasion fiscale, veuillez vous rendre à l’adresse suivante : http://www.liberation.fr/futurs/2014/07/01/l-entreprise-gattaz-reduit-ses-impots-et-augmente-ses-dividendes_1054724ou encore : http://www.lepostillon.org/Pierre-Gattaz-et-le-modele.html
66 Boulevard Mar Foch 38000 Grenoble